Comment aborder ?
Le médecin généraliste éprouve souvent des difficultés à dépister et conseiller les patients lorsqu’il s’agit de consommation d’alcool. Pour autant, il reste la pierre angulaire de la prise en charge, permettant un accompagnement de longue durée. La première démarche est d’aborder le sujet en consultation… Pas si simple, chacun sa méthode !
Un abord le plus souvent direct
Les problèmes avec l’alcool peuvent être abordés directement avec de nombreux patients ou après quelques questions essentielles du type :
- « Est-ce que vous avez pensé un jour à réduire votre consommation d’alcool ? »
- « Est-ce qu’il y a, autour de vous, des personnes qui vous ont dit que ce serait peut-être bien de moins boire ? »
- « Avez-vous été dans des états lamentables dans votre famille ou auprès d’amis ? »
"J’aborde le problème le plus souvent directement, en demandant d’entrée de jeu quel type de boisson accompagne le repas et en dehors du repas."
"Chez un patient dépendant à l’alcool, j’aborde le sujet sans aucune gêne, en général je ne lui laisse pas le choix."
Un abord parfois indirect
Certains médecins sont moins directs et posent une petite question ouverte, sans forcément cibler la question alcool, et voient comment le patient réagit, s’il est ouvert ou pas à la discussion.
"Ma technique pour aborder le problème du mésusage de l’alcool est d’évoquer avec le patient ses problèmes médicaux en lien avec son alcoolisation : hypertriglycéridémie, chutes à répétition, stéatose hépatique… Je l’amène à faire le lien avec son usage nocif de l’alcool. Je lui confirme que le problème existe et qu’une solution doit être envisagée."
"Je pose une petite question ouverte si je suspecte un problème, sans forcément cibler la question alcool. J’essaie surtout de ne pas stigmatiser ni moraliser."
"Je m’oriente progressivement vers la problématique alcool, car il est préférable d’attirer le patient plutôt que de le faire fuir."
La confiance, maître mot dans l’abord du patient dépendant à l’alcool
Un climat de confiance est nécessaire pour aborder le problème alcool et c’est en
discutant en toute confiance, sans jugement, qu’il est possible de mettre au jour le problème.
Cette notion de mise en confiance est relayée par l’ensemble des médecins à double titre :
- le patient peut profiter de l’espace de confiance au sein d’un cabinet médical (dialogue singulier, secret médical) ;
- le médecin essaie d'instaurer une relation de confiance pour que le patient soit prêt à discuter de sa problématique.
"Je n’ai aucune difficulté à aborder le problème car, si ces patients dépendants à l’alcool viennent voir leur médecin, c’est qu’ils ont confiance en lui."
Je leur précise qu’on travaille ensemble sur la confiance pour y arriver."
"Je pose quelques questions essentielles ; après quelques minutes, la confiance est là, le dialogue s’instaure assez facilement."
S’adapter à la personnalité du patient et être dans l’empathie
Il faut savoir s’adapter à la personnalité du patient pour faciliter son abord et lui témoigner de l’empathie pour l’aider dans sa démarche.
"Je suis très direct s’il le faut, mais j’adapte mon comportement à la personnalité du patient."
"Je n’aborde pas frontalement des patients que je connais peu ou qui sont nouveaux."
"Si je vois qu’il est dans le déni total, je ne force pas. J’attends qu’il soit prêt à se soigner avant d’aborder la question."
"Je leur dis que je ne suis pas là pour juger leur consommation d’alcool ou leur faire la morale, mais pour leur soumettre des solutions."
"J’essaie surtout de ne pas stigmatiser, de ne pas moraliser et d’être dans l’empathie."
Dr S.R. Dr Sophie Rougeaux, Dr N.A. Dr Nathalie Azzolin, Dr G.F. Dr Gaëtan Fremond, Dr J.-J.L. Dr Jean-Jérôme Le Coq, Dr J.-M.M. Dr Jean-Michel Marchadier, Dr J-H.S. Dr Jacques-Henri Soulère, Dr G.R. Dr Gérard Roussey
LES RECOMMANDATIONS DE LA SFA À RETENIR
L’abord de la consommation d’alcool avec un patient doit préférentiellement s’effectuer de manière ouverte, en évitant d’emblée les questions fermées qui limitent les informations spontanément fournies par le sujet.
Au cours de cette discussion, les éléments à rechercher en priorité sont ceux repris par les trois questions de l’AUDIT-C.
- Mésusage probable : score ≥ 4 chez l’homme et ≥ 3 chez la femme
- Dépendance probable : score ≥ 10 quel que soit le sexe